Liman von Sanders, chef de la 5ème armée ottomane et défenseur des Arméniens

Fin 1913, l’Empire ottoman s’est rapproché de l’Allemagne pour moderniser son armée, défaite pendant les guerres balkaniques, mais aussi lancer de grands projets économiques. Dans le cadre de cette coopération, qui éloigne la Sublime Porte de son alliance traditionnelle avec la France et l’Angleterre, qu’Otto Liman van Sanders est nommé à la tête de la mission militaire allemande auprès de l’armée ottomane. En 1915, la veille du débarquement allié, il commande la plus puissante armée turque pour défendre les Détroits : la 5ème armée.

Né en 1885 en Poméranie, von Sanders est l’archétype du noble prussien déstiné à la carrière militaire. Officier de cavalerie de formation, il occupe plusieurs commandements tout en s’élevant régulièrement dans la hiérarchie militaire même s’il n’est pas très populaire auprès de ses camarades. Lorsqu’il est nommé à son poste auprès de l’armée ottomane, il a le grade de Lieutenant-général. Il a occupé des fonctions au sein des états-majors des unités dans lesquelles il a servi mais il n’a aucune expérience au combat.

von Sanders à Cassel en 1913 alors qu'il commande la 22ème division d'infanterie

von Sanders à Cassel en 1913 alors qu’il commande la 22ème division d’infanterie

Lorsque la guerre éclate en août 1914, von Sanders va jouer un rôle prépondérant auprès du gouvernement turc pour le faire basculer dans la Triplice malgré l’opposition de certains officiers turcs francophiles. D’abord nommé à la tête de la 1ère armée en charge de la défense du Bosphore, von Sanders rejoint la péninsule de Gallipoli le 25 mars 1915 pour prendre charge la défense des Détroits sur ordre d’Enver Pacha, le ministre de la Guerre.

Avec six divisions (dont une de réserve, la 19ème, commandée par Mustapha Kemal) sous ses ordres, soit 84 000 hommes, von Sanders va organiser de mains de maître la consolidation des défenses terrestres des deux rives. Soulignons que plusieurs autres officiers allemands servent dans les états-majors divisionnaires turcs et partagent eux aussi leur professionnalisme avec leurs homologues turcs. Pendant quatre semaines, profitant de l’inaction des Alliés, von Sanders prend connaissance de la topographie du terrain et tente de deviner les intentions franco-britanniques quant aux lieux qu’ils choisiront pour débarquer. Même si certains désaccords existent avec ses subordonnés sur ses choix, son plan de défense va s’avérer redoutablement efficace (nous le détaillerons dans un article spécifique dès demain).

Reconnu en Allemagne pour son succès face aux Alliés, il reste quasiment anonyme auprès des Turcs dont la propagande préfère logiquement minorer son rôle. En poste dans le Caucase en 1916, il fera tout pour dénoncer et mettre un terme au génocide qui frappe les Arméniens, en vain. Il terminera la guerre à la tête de l’armée ottomane en Palestine en 1918.

SYLVAIN FERREIRA