3 mai : nouvelle attaque de nuit

Comme dans la nuit du 1er au 2 mai, les Turcs organisent de nouveau une attaque de nuit qui démarre par des reconnaissances agressives à partir de 20h lorsque le jour décline. Jusqu’à 3 heures du matin, les Français repoussent toutes les tentatives. Mais au point du jour, la ligne du 6ème Régiment Mixte Colonial fléchit.

Les Sénégalais peu habitués au combat défensif dans les tranchées sont ramenés jusqu’à la falaise des Oliviers. A 3h45, les renforts du 4ème Régiment Mixte Colonial et du 175ème RI (2 compagnies) rétablissent la situation et reprennent le terrain perdu. Peu avant 5h, le général d’Amade adresse au général Hunter-Weston, commandant de la 29th Division le message suivant : « La division française soutient depuis minuit les efforts d’une attaque ennemie de plus en plus pressante. Les troupes qui ont bien résisté jusque présent, et qui ont même repris l’offensive sur plusieurs points du front donnent des signes d’épuisement. Il s’agit en effet, pour elles, de la quatrième nuit de combat ; si la division anglaise agit immédiatement offensivement, elle soulagera la pression qui menace la ligne française. Je vous demande donc d’ordonner ce mouvement et d’informer Sir Ian Hamilton avec lequel vous êtes en communication afin que la réserve du Général soit également employée à ce mouvement pressant au cas où Sir Ian Hamilton le jugerait utile. »

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Soldats du 6ème Régiment Mixte Colonial dans une tranchée de première ligne.

En attendant la réponse des Britanniques, les réserves de la brigade coloniale sont engagées pour soutenir les troupes de 1ère ligne du 6ème Régiment Mixte. Après avoir renouvelé sa demande auprès d’Hunter Weston, les Britanniques mettent à disposition du C.E.O. la 2ème brigade la Royal Naval Division aux ordres du commodore Backhouse. Forte de 3 bataillons (Anson, Howe, Hood), la brigade est déjà engagée à l’extrême de la droite française près de la cote 236 avec son 1er bataillon (Anson). Les deux autres bataillons se placent en échelon sur la gauche du C.E.O.

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Soldats de la Royal Naval Division se lançant à l’assaut des positions ottomanes.

A 6h, la situation est globalement rétablie sur l’ensemble de la ligne française. Les positions abandonnées au cours de la nuit sont toutes réoccupées. Mais ce nouveau combat nocturne a encore accentué l’épuisement physique et moral des unités engagées.

Dans la journée du 4 mai, d’Amade établit un rapport alarmant à Sir Ian Hamilton sur l’état des deux brigades françaises aux ordres du général Masnou. Les pertes en officiers ont aggravés les conditions d’encadrement des unités, à la seule brigade coloniale quatre commandants de compagnie ont été tués au cours de l’attaque. Le rapport déplore que malgré ses demandes, la flotte n’ait pas soutenue la défense française à la hauteur du ravin du Kévérès Déré où elle aurait pu prendre en enfilade les troupes ottomanes qui s’y rassemblaient pour monter à l’assaut.

D’Amade préconise que les Sénégalais (2 bataillons) soient désormais placés en réserve afin de profiter de leurs qualités offensives et de ne plus les exposer aux attaques nocturnes dans les tranchées. Cela contraindrait le C.E.O à réduire son front et d’Amade propose que les Britanniques engagent deux bataillons pour prendre la place des Sénégalais.

Enfin, il s’inquiète de l’arrivée ininterrompue de renforts turcs, renforts attestés par la capture de prisonniers issus de nouvelles unités.

Le 4 mai au soir, la situation du C.E.O est donc précaire et même si Paris a accepté depuis le 30 avril l’envoi d’une seconde division pour renforcer les troupes durement éprouvées, elles ne sont pas encore arrivées à Sedd-ul-Bahr. La pression exercée par les Turcs depuis le 1er mai aura-t-elle raison de la vaillance des défenseurs alliés ?

SYLVAIN FERREIRA