12 juillet 1915 : un dernier effort sur le Kérévès Déré ?

Alors que la situation du C.E.O. devient de plus en plus dangereuse étant donné son exposition ininterrompue aux tirs de l’artillerie ottomane de la côte asiatique, le général Bailloud, qui a remplacé Gouraud, décide de poursuivre le « grignotage » des lignes turques en lançant une nouvelle opération sur le Kérévès Déré. 

A 4h30, l’artillerie entame son tir de préparation. L’artillerie ottomane répond et met hors service une des pièces de 14 de marine. Un autre obus atteint le P.C. du général Masnou, commandant la 1ère division, tuant le commandant Romieux, le chef d’état-major divisionnaire et blessant le général Masnou. Le colonel Vimont prend le commandement de la division. A 7h35, deux compagnies du 175ème RI occupent L-4, 0-5 et le bataillon Mahieu emporte les tranchées H.I, K-4. Les Turcs font pleuvoir un feu d’enfer sur les Français. Dans le secteur de H-I, la situation devient critique et l’éventualité d’un repli est un temps évoqué. Finalement, le commandement préfère lancer une attaque vers les tranchées I, J, K, à 19h30. L’opération est dirigée par le commandant Waddell et engage le bataillon de Légion étrangère (1er R.M.A.), quatre compagnies de zouaves et deux compagnies du 4ème colonial. Progressant en trois vagues, les troupes françaises emportent d’un bond les tranchées ennemies et repoussent à la nuit tombée les contre-attaques turques.

Général Masnou, commandant la 1ère division du CEO, blessé au cours de l'offensive du 12 juillet.

Général Masnou, commandant la 1ère division du CEO, blessé au cours de l’offensive du 12 juillet.

L’assaut dans le secteur de la 2ème division est chaotique car plusieurs compagnies du 2ème bataillon du 2ème R.M.A. qui mène l’attaque se trompent de direction. Bilan, aucun objectif n’est atteint à la fin de la journée. Pensant que le moral des Turcs est entamé, Bailloud commet l’erreur de poursuivre l’assaut le lendemain en fin d’après-midi mais c’est un échec total. Une seule tranchée est conquise dans le secteur de la 2ème division tandis que les hommes du 4ème colonial parviennent à atteindre enfin la rive droite du Kérévès Déré à la hauteur de la tranchée K7.

Carte du front au soir du 12 juillet.

Carte du front au soir du 12 juillet.

Ce nouvel échec souligne une fois encore l’exposition dangereuse du CEO aux tirs venus de la région de Koum Kalé. Après la blessure de Gouraud, c’est l’état-major divisionnaire de Masnou qui est neutralisé. Malgré les rapports et les demandes du gouvernement français auprès de Lord Kitchener, les Britanniques ne veulent pas entendre raison. Le général Joffre est donc sollicité pour étudier la faisabilité d’un débarquement français dans la baie de Bésika. Les conclusions de l’étude menée par son état-major montrent qu’une telle opération est possible uniquement en engageant des troupes nombreuses, or Joffre ne peut pas détourner une seule unité du front français où il prépare la grande offensive de Champagne pour le mois de septembre.

SYLVAIN FERREIRA